Retour sur le forum « Autogenous vaccines inswine medecine: why and how? »
Auteure : Gabriela Silva-Guerra, Centre de recherche en infectiologie porcine et avicole (CRIPA)
Article publié dans Porc Québec, Mars 2023, Volume 34 #1, Pages 34 à 37
Ce forum, organisé par le Centre de recherche en infectiologie porcine et avicole (CRIPA) et soutenu par les Fonds de Recherche du Québec, s’est tenu le 1er décembre 2022. Les experts invités ont discuté de plusieurs sujets importants, comme les nouvelles données sur les vaccins autogènes contre les bactéries Streptococcus suis (S. suis) et Glaesserella parasuis (G. parasuis), les défis de la vaccination contre le virus de l’influenza porcine de type A (VIPA) en Amérique du Nord et les expériences de terrain avec différents types de vaccins autogènes (vaccins à bactéries ou virus inactivés et vaccins à particules d’ARN).
Portrait de la situation des vaccins autogènes contre S. suis et G. parasuis
Dr Marcelo Gottschalk et Dre Mariela Segura (Université de Montréal) ont présenté leurs études de laboratoire et de terrain sur les bactérines autogènes contre S. suis. Pour les études sur le terrain, ils ont évalué l’efficacité de vaccins de différentes firmes pharmaceutiques utilisés chez les truies ou chez les porcelets. Les résultats ont mené à cinq faits saillants :
Les adjuvants eau-dans-huile semblent procurer une meilleure protection contre S. suis.
L’utilisation d’un surnageant de culture (même très concentré) dans la préparation vaccinale ne semble pas augmenter la protection par rapport au vaccin préparé avec les bactéries tuées et lavées (bactérines).
L’inclusion de plusieurs sérotypes de S. suis (vaccin multivalent) ne semble pas affecter la protection contre un sérotype spéci que inclus dans le vaccin.
En vaccinant les truies, il est dif cile d’obtenir des niveaux élevés d’anticorps maternels chez les porcelets de 3 à 5 semaines. Ainsi, un programme de vaccination des truies serait potentiellement plus utile lorsque les signes cliniques apparaissent tôt en post-sevrage.
La vaccination des porcelets entre 1 et 3 semaines d’âge ne semble pas entraîner la production d’anticorps vaccinaux, contrairement à la vaccination entre 3 et 5 semaines. Celle-ci pourrait être potentiellement utile lorsque les signes cliniques apparaissent tardivement dans la période post-sevrage.
De plus, l’importance des procédures de diagnostic complètes et d’une démarche scientifique appropriée lors d’études d’efficacité des vaccins (inclusion de groupes contrôles) a été soulignée.
Dr Eric Thibault et Dr Hubert Gantelet (Ceva Animal Health) nous ont fait part de certains constats en Europe, dont une volonté des autorités européennes de sécuriser le marché en améliorant la qualité et le contrôle des vaccins autogènes. La plupart des autovaccins sont utilisés contre des maladies bactériennes, S. suis étant la cible prioritaire. À cet égard, l’équipe de Ceva a évalué l’immunogénicité de vaccins autogènes contre S. suis chez des porcelets sevrés (en collaboration avec l’Université de Montréal). Ils ont conclu que le type d’adjuvant utilisé dans le vaccin influence considérablement la réponse immunitaire contre S. suis. Dans le même sens, Josh Elston et Dre Andrea Pitkin (Newport Laboratories, É.-U.) ont souligné que l’efficacité des vaccins contre S. suis repose sur l’utilisation des bonnes souches – nécessitant un bon suivi diagnostique, du bon adjuvant et de la bonne concentration antigénique. Leurs expériences sur le terrain ont rapporté que la vaccination des truies et des porcelets a permis de réduire à 1,0-1,5 % les pertes dues à la mortalité causée par S. suis.
Dr Brad Chappell a présenté les résultats d’expérimentations menées par la compagnie génétique Topigs Norsvin Canada avec différents vaccins, commerciaux et autogènes, contre G. parasuis. Leurs études de terrain, comparant des formulations du vaccin avec l’hydroxyde d’aluminium ou l’Emulsigen appliquées aux porcelets sevrés, ont démontré que cette dernière induisait une séroconversion significative (niveaux élevés d’anticorps) à 66 jours d’âge par rapport aux témoins.
À la lumière des différentes conférences, tous s’entendent sur l’importance du travail de diagnostic afin d’identifier et caractériser les agents impliqués.
Mieux intégrer les vaccins autogènes pour lutter contre l’influenza porcine
Dre Marie Culhane (Université du Minnesota) a présenté un portrait de l’influenza porcine aux États-Unis. De nombreux types de VIPA, soit H1N1, H1N2, H3N2 et H3N1, circulent dans les élevages américains1 . Le développement d’un programme de contrôle à long terme du VIPA doit reposer sur le suivi épidémiologique afin de documenter l’évolution génétique et antigénique du virus, et la constitution d’une banque d’isolats pour permettre une meilleure sélection des souches pour la formulation des vaccins. Ils ont démontré que la vaccination des truies contre le VIPA permet de réduire la prévalence d’infection de l’ordre de 74 % chez les porcelets au sevrage. La vaccination réduit également les risques d’apparition de virus réassortants.
Dr Kevin Vilaça (South West Vets, Ontario) a indiqué que pour contrôler le VIPA, il est également important d’informer les producteurs sur les facteurs de risque de cette infection, fournir à chaque producteur des rapports spécifiques à leur troupeau, impliquer l’ensemble des producteurs dans la démarche de contrôle et agir de manière proactive plutôt que réactive (vacciner avant l’apparition des problèmes). L’équipe de South West Vets a développé une base de données qui contient aujourd’hui les séquences de plus de 400 souches ontariennes de VIPA. L’utilisation d’outils de comparaison des séquences combinée à l’étude de sites antigéniques leur permet de sélectionner les souches à inclure dans l’autovaccin. Les objectifs poursuivis sont :
Disposer d’un vaccin multivalent offrant une protection contre les souches prédominantes en Ontario. Un premier vaccin « provincial » a été approuvé pour la fabrication en 2019;
Utiliser le vaccin de manière préventive avant que la maladie ne frappe un troupeau;
Exercer une surveillance continue des souches en circulation a n d’identi er rapidement les souches émergentes, et mettre à jour le vaccin régulièrement;
Assurer une immunité collective au moindre coût, et en ayant le moins d’impact possible sur les systèmes de production.
Au Québec, l’analyse des séquences récentes du VIPA suggère qu’un vaccin incluant 4 ou 5 souches correspondant à 4-5 « clades » pourrait convenir.
Finalement, la Dre Channing Sebo-Decker (Merck Animal Health, É.-U.) a présenté les résultats obtenus avec la technologie Sequivity, utilisée pour produire des vaccins autogènes contre le VIPA, voire d’autres virus comme les circovirus et les rotavirus porcins. Les avantages allégués de ce type de vaccin sont une réponse immunitaire humorale et cellulaire, l’absence de compétition antigénique avec les formulations multisouches, des réactions vaccinales extrêmement rares et la possibilité de différencier les animaux infectés des animaux vaccinés (DIVA). Dans le cas du VIPA, elle a insisté sur l’importance des « sites antigéniques clés (antigenic key sites) » qui déterminent la conformation de l’hémagglutinine et la qualité de la réponse en anticorps.
À la lumière des différentes conférences, tous s’entendent sur l’importance du travail de diagnostic a n d’identi er et caractériser les agents impliqués. Nous espérons que le forum aura inspiré tous les participants à persévérer dans leurs démarches a n de trouver des solutions dans la lutte contre les maladies infectieuses.
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